De Pierre, d'or et de feu, la création artistique au Moyen Âge IVe-XIIIe Siècle, Alain Erlande-Brandenburg

Cet ouvrage est né d'un double souhait. Le premier, purement égoïste, consistait à mettre par écrit les réflexions conduites depuis une vingtaine d'années devant mes auditeurs à la IVe section de l'Ecole pratique des hautes études, concernant les problèmes soulevés par la création au Moyen Age. Depuis ma première conférence, en 1971, j'avais insisté sur l'extrême difficulté de juger l'art du Moyen Âge en l'absence du nom des artistes; sur le fait qu'il s'agissait d'une défaillance documentaire; sur la nécessité d'imaginer derrière les œuvres des personnalités fortes.

Depuis lors, en diverses occasions, ma réflexion s'est nourrie des remarques des auditeurs; en même temps, des recherches effectuées en France comme à l'étranger soulignaient l'importance du sujet et sa légitimité. Le second souhait était de livrer à un public aussi large que possible ces remarques pour que l'approche de l'art médiéval échappe à la conception, encore trop largement répandue, dont nous avons hérité. Mon éditeur, Fayard et, en l'occurrence, Denis Maraval, m'a non seulement encouragé à me lancer dans cette entreprise, mais, tout au long de son élaboration, m'apporta consilium et auxilium alors que mes activités professionnelles me privaient des bonheurs du métier d'historien.

Il était nécessaire, pour arriver à bon port, de cerner le problème, d'éviter les écueils et de tenter d'être clair. Le sujet consistait à rendre aux êtres humains leur place dans la création artistique. L'histoire de l'art du Moyen Âge, sous prétexte d'anonymat, a été imaginée comme s'étant développée suivant une loi interne pour atteindre un but : elle échappait à l'histoire, aux contingences du moment.